Mes copines

Je vais vous présenter mes Copines, les copines de proximité.

D’abord, y a Baba. Meuh non, je rigole. Quoique. Ma grand-mère bosniaque se révèle avec l’âge une sacrée caille. Elle est drôle, et drôlement mal élevée, elle dit tout haut ce qu’elle pense, elle enverrait balader Sarkozy venu en personne la reconduire à la frontière et elle est bientôt morte (dit-elle). Si j’enlève le fait qu’elle me harcèle concernant mes amours, je la trouve digne d’être une Copine.

Y a les 2 copines de fac, Marielle et Bastille. Marielle est à la colle, depuis l’âge de conduire et de voter, en gros, elle a passé plus de temps accompagnée que seule. Elle a un jules sympa, et fin, délicat, il ne dit jamais, alors Marie, comment vont tes amours ? ou, une belle fille comme toi, quel gâchis, est-ce que tu baises au moins ? personne ne le dit jamais remarquez. Marielle a deux filles, Apolline et Victoire, elles sont futées et mignonnes même si elles me disent, il est où ton amoureux, y t’a plaquée ?, ou quand elles disent à Baba, t’es trop vieille, tu devrais être morte. Marielle fait régulièrement des Gaffes Impardonnables au sujet de ma situation :

– exiger que je vienne les voir toute affaire cessante un dimanche pluvieux de novembre alors qu’ils habitent dans une banlieue qui est presque quasiment en Province (tu viens jamais nous voir ! tu nous laisses tomber !)

– me placer à table, à son mariage, à côté de son cousin célibataire à vie, il est pensionné quasi car c’est un autiste non encore repéré comme tel, mais moi j’en suis sûre (je te mets à côté parce que t’es sympa avec lui et qu’il t’aime bien, tu le mets à l’aise), alors que le cousin de son jules à elle, beau et célibataire, a été placé à côté de Véronica, une étrangère venue voler les hommes aux femmes de ce pays… qui se l’est d’ailleurs emporté à la fin de la soirée (mariée depuis avec, 2 enfants).

– me dire après m’avoir invitée à un dîner de cons euh de couples + un homme seul (petit, chauve et morguologue), comment ça y t’a pas plu ? Je comprends pas ! C’que t’es difficile !

– soupirer au square devant un nouveau-né en bavouillant… ah… dire… dire que je connaîtrai plus jamais ça… vu qu’on va s’arrêter à deux… les impôts, la crise, la guerre en Irak…

– et autre Gourderie de ce style.

Y a ensuite Bastille qui en est 140 mecs. Meuh non, je rigole. Disons qu’elle exerce le speed beding, expédiant les amants comme on trie le courrier aux PTT, on dirait un Shadock épuisant tous ces essais afin d’arriver le plus vite possible à la bonne pêche. Elle se dit avoir un cœur de pierre mais quand on a vu le promeneur du champ de mars, elle n’a pas arrêté de sangloter (à moins que c’était le Titanic, je sais plus). Elle honnit les « horribles petits couples » qui dînent le vendredi soir au restaurant et batifolent mollement après pour être en forme le lendemain pour le ménage et les courses. Elle m’appelle sainte Thérèse, tout ça parce que je déteste coucher avec quelqu’un que je connais même pas, et elle jure sur ses grands dieux qu’un jour, elle se casera pour avoir un enfant avec lequel elle partira dès que euh possible.

Y a aussi Marthe, une copine d’adoption, au sens où elle est tellement seule qu’on se relaie (enfin moi surtout) pour la sortir de temps en temps. Marthe est obsédée par le couple, ok, c’est pas la seule (parce que même Bastille, dans son genre, en est obsédée tant elle traque « les horribles petits couples »…). Elle jure que sa vie ne commencera que quand elle aura un mec, pour de vrai. Elle voit pas si tôt un mec que déjà, elle le projette dans un trois pièces chambre d’enfant pour voir s’il irait bien avec le mobile coincoin. Vous la rencontrez, au bout de 10 minutes, vous savez tout de sa grande histoire avec Antoine (une nuit) qui a été le commencement de la fin (la mouise mâléfique). On n’ose plus lui présenter qui que ce soit car elle se jette avec grande ardeur sur le pauvre garçon, pas de façon sexuellement terrifiante, non, mais avec la puissance de la grande solitude, genre grande marée qui balaie tout sur son passage. Je l’ai maintes fois conjurée de ne pas dire au premier venu : avant toi, ma vie c’était de la merde ou avant toi, je n’existais pas ou encore, si tu pars, je me tue, car ma vie n’aura plus de sens. Etc.

Elle ne veut pas comprendre, pour elle c’est le plus beau compliment que l’on puisse faire à un homme, et puis d’abord, c’est vrai. La vie sans mec, c’est de la merde.

– Sans amour, tu veux dire, je la corrige.

– C’est la même chose ! Elle glapit.

– Ben non, regarde George Bush, c’est un mec, tu crois que la vie sans lui, c’est vraiment de la merde ? C’est pas plutôt le contraire ?!

– Tu mélanges tout ! Elle proteste, ses yeux errant sur l’alentour car elle vient d’apercevoir un homme seul, marchant dans l’allée du jardin.

– Pas du tout ! Je proteste de même. C’est juste pour te montrer que les mecs, ne sont pas tout, et puis de toute façon, qui voudrait d’une vie qui est de la merde sans lui ?

– Tu crois que je lui plais ?

Me demande soudain Marthe, égale à elle-même. Elle veut parler du pauvre type qui marche dans l’allée, et qui a eu le malheur de laisser traîner une demie seconde son œil gauche sur nous. Parce que Marthe est comme ça aussi, tous les mecs la draguent. Si. Elle n’est pas la plus moche, mais ce n’est pas non plus le genre de fille dont vous diriez, ils en sont tous fous. Elle a une grosse natte avec une frange de traviole, des yeux comme des billes, ronds et bleus, et une bouche de grenouille. Toujours est-il qu’ils la veulent tous, mais inexplicablement, n’y parviennent pas. Elle a même collé durant plusieurs mois un mec, très sympa, très drôle, mais très pédé, qui a essayé gentiment de lui expliquer en quoi ce n’était pas possible. Elle pense qu’il lui a dit ça parce qu’il avait peur de l’engagement. Seigneur. J’aime Marthe pour le réconfort qu’elle m’apporte (il y a pire que moi) et je la déteste pour le miroir qu’elle me tend (une vieille fille qui radote sur la folie des hommes la concernant).

Il y aussi Louisette, que j’ai rencontré dans un boulot d’été où on ramassait du raisin que l’on buvait vieilli en fût de chêne le soir. Elle a vécu 8 ans avec un type qui l’a quittée du jour au lendemain pour une Cubaine, depuis, elle déteste Cuba et en apprenant que le joyeux Fidel allait peut être casser sa pipe, elle m’a offert le restaurant. Elle est drôle, jolie, elle a parfois des amants mais le cœur n’y est plus. Comme elle est plus jeune que moi (c’est une fillette de 33 ans), je compatis mollement et puis en fait, je ne crois pas qu’elle restera seule toute sa vie comme moi. Elle est trop normale. A 13 ans, elle allait en boom et embrassait son premier garçon (moi je lisais Proust à l’envers et en chinois), à 15 ans, elle égarait son hymen sur une dune de l’Atlantique, à 16 ans, elle venait passer le week-end chez papa-maman avec son mec (quand ma mère, elle, aurait appelé l’Onu pour libérer le territoire conquis), à 18 ans, on les voyait mariés ensemble, à 21 ans, ils se séparaient, à 21 ans et deux mois, elle était déjà avec un autre, avec qui elle est restée donc 8 ans. Sa seule anormalité, c’est qu’il est parti sans crier gare, et ça, elle lui en veut énormément, elle n’était pas prête pour une vie anormale.

Il y a enfin Aveline, que j’ai rencontrée au bal de la Parfaite. Elle est normale mais dans une autre façon. Ni trop coucheuse ni pas du tout. N’a jamais vécu une histoire plus d’un an et pense qu’elle finira vieille fille, sans connaître l’accouchement ni le blues des 7 années de copulation. Elle doute d’elle, elle pense toujours que c’est elle qui a tort quand un mec la plaque, qu’elle est trop moche et trop tout ce qui ne va pas (indépendante mais fragile, de l’opinion et des doutes, du cœur mais trop de peaux dessus, la fesse pas bégueule mais sans l’âme d’une partouzeuse, etc). Elle a une moyenne de 1,4 mecs par deux ans, pour une durée allant de 2 heures à 26 jours. Elle a bientôt l’âge critique (37,8 ans), celui où on ne voit plus que les défauts des hommes et où on a le feu aux ovaires au point qu’on cherche le père sous l’homme. Elle ressemble à Charlotte Gainsbourg (mariée, deux enfants), pour le physique et la fragilité. Elle travaille dans l’édition, où y a un paquets de nanas, jeunes et jolies, avec des éditeurs chauves et radins pour les commander au-dessus.

Voilà pour les copines de proximité. Y en a d’autres, qui vont, qui viennent, j’ai de la chance, je suis pas seule dans ma solitude mais quand même si.

Je vais aller me servir un verre de martini tenez.

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