Un oiseau à Delhi

Un oiseau à DelhiA Delhi, on trouve d'admirables berceaux de verdure. Il y a tout d'abord les parcs et jardins mais dès lors qu'ils sont en accès libre et gratuit, la tranquillité du touriste (de la touriste surtout) n'est plus de mise (il faut décliner son nom, son état matrimonial, et même parfois, repousser des assauts plus précis).
 
Il vaut bien mieux s'acquitter d'un ticket d'entrée dans un site touristique, au vert, visiter vite fait le monument, clic clac, puis sur un banc, profiter (entre deux averses) du relatif silence comme de l'agréable fraîcheur émanant de tout ce vert so british servi avec le monument historique… Il faut certes parfois franchir auparavant une barrière de gardiens et gardiennes peu amènes, pratiquant la fouille au corps par identité de sexe (pudeur indienne), obnubilés qu'ils sont par votre sac à dos et votre potentialité terroriste, tout en vous dissimilant comme par pur mauvais esprit, les informations essentielles (vestiaire obligatoire, retour à l'entrée du site, 200 mètres plus haut, par exemple). Il est vrai que ce pays n'est pas le moins touché question attentats, nous y étions d'ailleurs quand Bombay a sauté (enfin, le train) mais le pays est si vaste que pour nous, égoïstes touristes, cela nous semblait avoir eu lieu sur une autre planète.

Le banc et le petit oiseau, ainsi que l'écureuil en dessous, proviennent d'un joli parc, ceignant une très ancienne mosquée, ne m'en demandez pas plus, elle fait partie du patrimoine musulman de la ville, parfois dérivant de monuments qui préexistaient à la conquête islamique. Beaucoup d'Indiens visitent les sites touristiques du pays, ils aiment à vous prendre en photo, ce qui est toujours un ravissement, non par narcissisme échevelé, mais pour le simple clin d'œil que cela fait à cette curiosité et à ce goût pour l'exotisme que l'on ne pensait être que le nôtre. Etre exotique pour quelqu'un, c'est toujours un peu excitant.
 
Ce jour là, cependant, étant donné la pluie qui ne cessait pour ainsi dire pas, on avait les lieux pour nous tous seuls. Ernesto et le petit prince s'en sont pris aux écureuils (course effrénée) devant l'œil goguenard d'un gardien, tandis que Baba et moi, nous écrivions imperturbablement, sous le grand parapluie orange de Baba, des cartes postales à toutes celles et à tous ceux qui n'avaient pas la chance de partir comme nous se tremper sous la pluie quand on peut le faire toute l'année à Paris, tout en attrapeant la chiasse-curry et en partageant son lit avec cafards et tâches de sperme.

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