La Parfaite a un défaut! 2

Peu après ce mémorable réveillon du premier de l'an, et alors que je rentrais de Berlin avec Aveline dont le frère était prof de français là bas (cure intensive de Wurtz et de bières, vous raconterai ça plus tard), je me suis rendue à un tidîner chez mes vieux qui devaient passer le nouvel an à Paris avec Parfaite et ses moutards et qui voulaient remettre ça avec moi le 15 janvier.
 
Je suis arrivée à l'heure (1/2 heure de retard c'est tout) pour trouver mes vieux accablés sur le canapé, ma mère sanglotant littéralement dans son mouchoir tandis que mon père ne cessait de répéter, je vais bien trouver une solution, je vais bien trouver une solution… Baba, enfoncée dans un fauteuil, nez sur genoux, ricanait doucement, je vous l'avez bien dit, Carla, je vous l'avais bien dit !
 
Je crus tout d'abord que c'était mon retard qui justifiait un tel mélodrame. Mais non. Car ma mère lâcha alors dans un énorme cri….
 
–         Parfaite, ma fille Parfaite a un défaut !

J'ouvris aimablement des yeux ronds. Pour ma part, je trouvais qu'elle n'en avait pas un mais au moins dix mille, qui étaient il est vrai les défauts de ses qualités (confiance en soi=vanité, grande culture=étalage, esprit d'organisation=autoritarisme, etc). Mais il est vrai que ma mère l'avait achetée par internet sur e-bay sur la foi de cet étonnant fondement : Parfaite était parfaite.
 
Baba gloussa encore.
 
–         Et quel est-il ce défaut, ma chère Bosse ?
–         Carla… grogna ma mère. Bosse c'est mon nom de scénille…
–         Qu'importe ! Glapit Baba. Quel est-il ce défaut ?
–         Elle a une mère ! Hurla littéralement la mienne. PARFAITE A UNE MERE !
–         Vous ! S'écria Baba. Sa mère c'est vous non ?
–         Non ! Cria ma mère. Si ! Euh non!
–         Bon ben alors quoi ? S'énerva Baba.
–         Carla veut dire que Parfaite a une VRAIE mère, expliqua gentiment mon père.
–         Carla n'est pas sa vraie mère ? S'étonna Baba.
 
Je l'aurais tuée.
 
–         Non ! Bien sûr ! C'est pas sa VRAIE mère puisque c'est moi sa VRAIE fille ! Je me suis mise à brailler à mon tour.
–         Et alors, il n'est pas interdit d'avoir deux filles à ce que je sache ? Grogna ma Baba.
–         Sauf que ma mère A MOI, Carla Bosse, elle n'a pas accouché de la Parfaite, elle l'a achetée !
–         Oh ma chérie, gémit mère, je t'en prie ! Ne fais pas un telle différence entre toi et ta sœur !
–         Oh maman… j'ai gémit à mon tour.
–         Mais vous vous doutiez bien que Parfaite appartenait à quelqu'un non ? A demandé Baba.
–         Non ! Si ! Euh non! A couiné ma mère qui s'est remise à sangloter en suçotant un torchon de cuisine genre pougnougnou pour bébé vomiteux.
 
Seigneur.
 
–         La mère de la Parfaite a resurgi, nous expliqua alors mon père à Baba et à moi, elle a récupéré sa fille avec ses petits-enfants et nous avons attendu tout le premier de l'an qu'elle daigne venir déjeuner chez nous… mais non… elle déjeunait chez sa mère… avec les petits…

Ma mère s'est quasiment roulé de douleur façon pleureuse irakienne sur le canapé  blanc. J'ai vu, signe de dérèglement grave, qu'elle avait gardé ses chaussures avec lesquelles elle martelait le blanc canapé sur lequel ni Baba ni moi n'avions le droit de nous asseoir à moins d'être en pyjama.

–         Ah, j'ai fait d'un ton mou (pas mécontent).
–         Mais bon, a émis Baba, les liens sont tissés, les petits sont attachés à vous, vous allez partager non ?
–         Non ! A crié ma mère. J'ai accepté de donner mon Ier de l'an, mais voilà que maintenant, Parfaite vient de m'annoncer que ses enfants ne viendraient pas non plus chez nous en février ! Elle dit que sa mère veut rattraper le temps perdu !
–         Quelle salope, a constaté Baba.
–         Quelle grosse enculée, j'ai rajouté.
–         Ils me manquent, elle me manque déjà, oh que je souffre… a sangloté ma mère. Ce sont mes uniques petits-enfants et je ne les verrai plus jamais…
 
Bon, et moi dans tout ça, je fais quoi ? Je vais sur e-bay me proposer à la vente ?
 
–         Bah, a dit Baba, votre feignasse de Marie vous pondra peut être un gluant d'ici la ménopause…
–         Oh celle la… a dit ma mère en me jetant un regard limite infanticide.
 
Et là, honte à moi, j'avoue que je me suis mise à pleurer. Vlang ! Vous avouerez que c'était raide pour commencer l'année non ?
 
Le professeur Colza, malgré mes 37 ans et demi, m'a prise sur ses genoux et il m'a caressé les cheveux.
 
–         Allons, allons… il m'a consolée. Ta mère ne le pense pas vraiment !
–         Si ! A couiné ma mère. Marie n'y arrivera jamais !
 
Je ne pleurais plus, je hurlais sur les genoux de mon père. J'avais six ans, on venait de m'apprendre que ma mère n'était pas pas mère, ou qu'elle était partie avec un avaleur de sabres, ou, ou…
 
–         Moi je pense que tu peux y arriver, a dit gentiment mon père à mon creux d'oreille, si toutefois tu arrêtes de faire la difficile…
 
Je pleurais maintenant allongée sur la moquette, le nez coulant dans les bouclettes, tapant du pied, du poing.
 
–         Vous avez récupéré une petite, a fait finement remarquer Baba. Elle a un sacré caractère ! Regardez moi cette colère ! Elle ira loin dans la vie, se fera pas marcher sur les pieds elle au moins!
–         Mimi, m'a alors fait ma mère, viens sur mes genoux…
–         Non !
–         Ma mimi, arrête cette comédie !
–         Non !
–         Maman t'aime ! Maman t'aime très fort ! A gémit ma mère. C'est pour ça qu'elle aimerait aussi avoir un enfant de toi à aimer tout aussi fort, ça serait l'explosion atomique de l'amour !
–         Mon Dieu ! A fait Baba en se cachant les yeux. Ces gens là sont-ils vraiment ma famille ? Ou suis-je en train d'errer sur e-bay ?
 
Toujours est-il que la Parfaite avait fait un coup de vache à ma mère. Elle aurait pu partager entre les deux vieilles mais non, elle avait décidé, dans cet élan primitif typique des bonnes femmes quand elles ont mis bas, que ses chers petits passeraient désormais leurs vacances avec leur vraie grand-mère, une espèce de chimpanzé aux poils blond platine, qui était remontée de la côte rien que pour briser cette femme, ma mère, qui avait osé acheter son enfant à elle sur e-bay (où elle l'avait mise en vente car je crois bien que la Parfaite lui cassait aussi les pieds de sa mère génétique). Parfaite, qui n'aimait pas déplaire, et qui, même quand elle faisait une crasse, faisait tout bien, avec le sourire et la lampe à bronzer, avait ensuite assuré à ma mère que les enfants passeraient "certains mercredi" chez elle, un samedi après-midi par mois et trois jours en été dans la maison de famille de mon père en Auvergne.

On est enfin passés à table, enfin Baba et moi, ma mère cuvait son chagrin et mon père testait une invention de son cru pour que sa chère femme puisse récupérer sa saloperie de fausse fille (le repousse-moi-ta-mère, un produit qui passé sur les cheveux de la victime, la mère de Parfaite, la rendrait répulsive à qui partageait une partie de ses gènes… ). Je suis restée dormir sur le canapé, au cas où ma mère (qui n'a jamais besoin de moi) aurais besoin de moi, son vrai fruit des entrailles.

 

2 thoughts on “La Parfaite a un défaut!

  1. Reply LN22 Jan 27,2007 11:23

    EUHHHHHHHHHHHHHHHHHH Y\’A DES GENS DE LA FAMILLE QUI LISENT TON BLOG???????????????????????? parce que moi j\’ai tout compris !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

  2. Reply Princesse Marie Jan 28,2007 18:22

    T\’inquiète poulette, tout le monde s\’en fout dans ma famille, à commencer par les principaux intéressés… ça a ça de confortable au moins!!!!

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