Du respect, du respect pour le Peuple…



Jour des poissons, sortie des parents, direction l’Olympia,
la salle de concert pour vieux, ce soir là remplie (pour l'essentiel) de blancs, jeunes et vieux, venus écouter
Amadou et Mariam, le couple-de-maliens-aveugles, et bien plus que ça !

Souvenir d’un premier concert à la boule noire, un dimanche
pluvieux et froid de février, avec mon vieux poteau d’Aveline, avant que de
s’embarquer peu après pour un voyage en Afrique. Folle ambiance, avec Mariam et
son déjà « chaud, chaud… » et son « applaudissez
beaucoup ! ». Très sympathique concert qui nous avait transformé un
dimanche parisien tête de chien en dimanche bariolé à Bamako (bon, ok, le titre
n’existait pas encore à l’époque).On avait bu une bière après dans un rade beaucoup moins joyeux, et on s'était dit, va pour l'Afrique!

Autre concert, au Bataclan cette fois, en
2002 je crois bien, avec un feu Bamba le blanc, qui y avait traîné sa bedaine
et ses antidépresseurs, pour ressortir en nage et tout affolé de joie. Il avait
ensuite débarqué chez lui tel une furie alors que devisaient calmement d’Allah et
de Sélim Touba, ses deux squatteurs portés sur la mystique et le chanvre, son neveu Mohamed le Blanc et un
Sénégalais sans papiers, en braillant des « c’est génial, c’est génial, ah
ce concert m’a donné une de ces pêches ! ». Il avait même dû doubler
la dose des somnifères pour réussir à trouver le sommeil.

Et cette fois ci, donc, la consécration (?) avec un unique concert à
l’Olympia. Et toujours, toujours le même effet prozac sur moi de cette musique,
que d’aucuns pourraient qualifier de simpliste, au moins concernant les textes
mais qui à chaque fois me donne envie de bondir de joie comme feu Bamba le
blanc. Allégresse un peu (mais si peu) diminuée par la grandeur de la salle par
rapport à la petitesse de la boule noire où nous étions presque, Aveline et
moi, le menton sur l’estrade, et aussi deux nuques façon militaires qui
m’obstruaient la vision, et un poteau vêtu de cuir à mes côtés, qui n’a pas
vibré d’un pouce occupé qu’il était peut-être à apprécier le concert au travers
son numérique.

Mais tout de même, « chaud, chaud » comme le
scandait Mariam, impavide sur scène, serrant bien fort son micro dans sa main
tandis qu’autour d’elle se déchaînaient son jules, couché sur sa guitare
électrique, et le percussionniste s’en donnant à cœur joie avec les deux belles
des chœurs qui, au rappel, ont multiplié les danses et les sauts. Tous les
grands titres ont défilé, dont certains avaient à c’t’heure, une résonnance
particulière, tel le « que de haut, que de bas dans ce monde, triste
réalité » ou « du respect, du respect pour le peuple… ». On
imaginerait assez un parachuté doré ricaner follement sur les paroles de cette
chanson, certes naïves mais qui, chantées en chœur, résonnaient comme un message
des masses fatiguées de tous ces travioleux de politiciens, qu’ils soient
blancs ou noirs et aspirant à un retour à des valeurs simples (du bonheur, du
respect lalalala).

On en est resortis tout requinqués, prêts à remettre ça une
quatrième fois (me concernant du moins). Dans le métro, en face de nous, deux
post-adolescentes blondes chantonnaient en petit bambara, un air venu tout droit de l’Olympia
tout en dénombrant le nombre de cours qu’elles avaient séchés cette semaine là. Mais remplis que
nous étions par la fête et la joie dans lesquelles Amadou et Mariam nous
avaient baignés toute la soirée, on s’est même pas sentis vieux.

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