A mort le foot !!


Avec A nous pourrions bien être
déchus de notre nationalité nationale.

En effet, hier soir, alors que
les cons en bleus s'apprêtaient à affronter les cons en vert, nous avons
multiplié les exorcismes afin que l'équipe supposée être l'objet de toutes nos
prières soit éliminée et que nous connaissions la joie d'un mondial sans participation
de notre équipe de cons en bleu multimillionaires. Après avoir éparpillé aux quatre
pôles de l'appartement, les tripes d'un tofu pané (végétarisme de A oblige),
nous avons ensuite psalmodié des incantations, ballon percé, ballon crevé, France
éliminée !!, qui ont fait hurler de rire le Zébulon. Enfin, nous avons
brûlé le journal L'Equipe dans l'évier
de la cuisine en clamant, Equipe
brûlée, Equipe cramée, France éliminée !!,
ce qui a beaucoup plu aussi au Zébu qui a tapé dans ses mains en braillant,
avo, avo.

Bien sûr, Cléa Culpa n'a pas
manqué de nous traiter de sales bobos, ce qui était faux puisqu'il y a des
bobos qui sont assez cons pour aimer le foot. Bourgeois alors, elle a craché,
vous avez un mépris digne de votre classe pourrie, qui considère que le foot
est un sport populaire tout juste bon à distraire le prolétaire. Peut être,
nous lui avons clamé aux oreilles, mais tous les détenteurs de clubs sont de
gros bourgeois et le salaire moyen d'un con footeux moyen est au moins 10 000
fois supérieur au smic de ton cher prolo. En plus, chère Cléa, tu connais le
vieil adage, du pain, des jeux, et moi la haut je fais c'que j'veux !



Elle a prétendu qu'on mélangeait
tout, et que nous confondions le sport avec l'affairisme, qui était une autre
affaire encore. Peut être mais en attendant, c'était bien sur le compte des
touche à la baballe qu'allaient les millions hein ducon.

Alors qu'on dînait, de violentes
clameurs avec coups de klaxon ont éclaté dans la rue.

–         
C'est bizarre un mariage un soir en semaine, a
remarqué A. C'est peut-être un pacs…
–         
Pfuit, j'ai fait, je crois que les supporters
des cons en bleu sont juste assez cons pour crier victoire avant même le début
du match…
–         
C'est vous qui êtes cons, a rétorqué Cléa Culpa
qui essayait de suivre le match sur la télé du voisin d'en face, ce sont les
Algériens qui fêtent leur victoire…
–         
Ah tu veux dire que les cons en vert de la rive
sud ont gagné contre les cons en jaune, a gloussé A, planquez les pharaons, ou
ils vont encore payer pour le Sport…
–         
Et raciste avec ça, a craché Cléa Culpa.

Qui avait mis la main sur une
paire de jumelles destinée à l'observation de la faune en montagne pour réussir
à voir un peu mieux l'écran du voisin, mais après tout, ce qui se passait sur
le terrain relevait aussi de la faune.

–         
Dans le cadre du grand débat sur l'identité
nationale, a commencé A, je propose qu'on impose, et de chanter la Marseillaise,
et de regarder la coupe du monde de foot en 2010 quand c'est la France qui joue !
–         
Tiens c'est vrai ça, j'ai repris la balle au
bond (ah ah), il n'y a que sur les terrains de foot et les champs de bataille
qu'on le chante, ce stupide chant, c'est pas un signe ça ? Militaires,
footballeurs, même combat ?
–         
Très drôle, a marmonné Cléa Culpa.

Qui était toute crispée par la
crainte sans doute du résultat, à moins que ce ne soit de regarder le match à
50 mètres de distance avec des jumelles.

–         
Ohlala, faites qu'on perde ! J'ai encore
soupiré. Je n'en peux déjà plus de cette connerie de foot…
–         
Shut up !
A braillé Cléa Culpa. Ou je vous dénonce à Besson le pantalon !

Tiens, à propos de Besson, d'identité
nationale et d'appartenance. Moi je dis que, si on veut être naturalisé
français et traité honorablement, mieux vaut marquer un but sur un terrain vert
que de crever tripes à l'air sur un champ de bataille couleur rouge sang. Parce
que si l'on prend l'exemple des tirailleurs sénégalais. En tant que combattant pour la France
et anciennement colonisés, ils ont pu garder leur nationalité française, certes, mais une
fois à la retraite, leur pension n'a été aucunement égale à celle de leurs
collègues français de souche (ah ce mot, ça fait vraiment grosse bûche). Or je
ne pense pas qu'on divise par trois la pension d'un joueur de foot qui aurait
été naturalisé par la grâce de son coup de pied.

Pour en revenir au foot, j'en ai
plus que ma claque déjà. Il FAUT aimer le foot. Sinon on passe, soit pour une
peine à jouir (ohlala c'est quand même trop chouette toutes ces scènes de
liesse dans les rues, tous ces gens mélangés ensemble, blancs, noirs, lepénistes,
sidérurgistes, ségolénistes, végétariens, hypermétropes, que sais-je encore…), soit
pour une intellectuelle coupée du peuple (quoique qu'on rencontre un paquet de
binoclards qui jurent sur leurs grands dieux suivre avec passion les matchs de
foot), soit pour une pauvre bourgeoise snobinarde (quoiqu'il serait plutôt
assez snob de dire, vêtue d'un serre-tête et d'un duffle coat bleu marine sur
jupe plissée, que l'on est furieusement fan de foot).

Ce matin encore, dans Libé, cette phrase d'un philosophe,
Robert Maggiori, « un philosophe se contredirait s'il disait d'une part
vouloir explorer l'âme des hommes, rendre compte de la complexité et de la
force des passions, et de l'autre afficherait le plus parfait mépris, ou l'ignorance,
du football ». Donc, s'il faut savoir toucher du ballon pour être un bon
joueur de foot, il faut aussi aimer le foot pour être un bon philosophe. Quand
je dis que le foot rend con, des exemples tous les jours fleurissent sous nos
yeux, y a qu'à se baisser et ramasser.

Hier soir d'ailleurs, avant que
ne se tienne cette grand messe que seuls les intouchables et les pervers de la
Nation allaient bouder, France Inter avait invité à 19 H 20, la secrétaire d'Etat
au sport, Rama Yade.  Je ne dis pas que c'est
une conne, attention, je dis juste qu'étant secrétaire d'Etat au sport, elle
est en contact avec des agents lourds de contamination (footeux et umpéteux).

Rama Yade, par ailleurs sacrée
personnalité politique préférée des Français (quand je vous dis je vous dis que
je suis de moins en moins française depuis hier soir !!), expliquait que
sa propulsion au ministère de la jeunesse et des sports, n'était pas due à l'exercice
d'un coup de pied présidentiel sur un derrière aussi récalcitrant que bruyant d'une
jeune écervelée, mais bien plutôt le geste magnanime d'un Président qui adore le sport, au pont que c'est pour lui quelque chose d'aussi important que pour tous
ces nombreux licenciés de clubs sportifs aussi divers que variés qui
constituent le peuple actif de France.

Bref, Rama Yade dans les vestiaires, c'est
une promotion et pas une punition.

Ce qui me fait dire que si vous
désirez réussir dans la politique, un conseil. Investissez dans l'achat de
billets au stade de France plutôt qu'à l'opéra de Paris, soyez vu dans les
travées des stades plutôt que dans les poulaillers des salles de concert. Et par
ailleurs, n'hésitez pas à ruer bruyamment dans les brancards, la main solidement
tenue à la rampe de cet escalier que vous avez entrepris de gravir en direction
du Pouvoir. Il faut qu'on parle de vous, que Dieu le père vous admoneste sans
toutefois vous liquider entièrement. En effet, si l'on croit l'analyse du
sondage d'opinion concernant la personnalité française préférée des Français, Rama
Yade n'a cessé de gagner des points en capital de sympathie depuis qu'elle s'oppose
à Nicolas Ier et qu'elle s'est vue rétrogradée dans ses fonctions politiques (même
si, on le répète, c'est là un signe de promotion).

Si le foot vous répugne vraiment
par trop, vous pouvez aussi accumuler les scandales financiers en tâtant le cul
des vaches, il semble que cela soit aussi une bonne manière d'être aimé de ses
con-citoyens puisque Jacques Chirac était au coude à coude avec Rama Yade.

En conclusion, j'ajouterai que
mon petit dieu mort, Pierre Desproges, détestait par-dessus tout le foot et son
cortège de gros bœufs embiérisés, au point qu'il avait tourné un sketch où on
le voyait avec un comparse, arborant l'écharpe d'un club de foot quelconque, la bière à la
main, braillant de vibrants, allez les bleus !, vive le foot !,
tandis que derrière se déroulait une scène façon Hessel (stade où périt des dizaines
de supporters piétinés dans un affolement général dont la raison a échappé
à  ma mémoire).

A mort le foot donc !! Vive
les Irlandais et mort aux bleus !

(mince, ils ont gagné ? la
main de Thierry Henri ? tricheurs avec ça ?!)

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