Ne pas la nommer, c’est en partie y échapper

La Grèce et son plan d'austérité,
que dis-je, de réduction drastique des dépenses publiques, oh la
que dis-je, de contrôle raisonné de ses dépenses publiques,
est-elle notre miroir de demain?

Vous voulez rire!, s'esclaffe (jaune)
le premier ministre, nous sommes notés A+++, alors pas de risque que
ça nous arrive à nous…. avant longtemps… corrige une
voix sinistre au fond de la classe… si ce n'est bientôt,
re-corrige une autre en ricanant… non, non! S'excite le premier
ministre, nous, nous sommes les bons élèves de l'Europe, nous ne
sommes pas des PIIGS, nous sommes comme, comme… les Anglais par
exemple!


Mauvais exemple, monsieur premier le
Ministre. Les Anglais croulent sous le déficit public (on se demande
bien comment, vu qu'ils ont tout privatisé et que l'Etat se retire
du peu qu'il lui reste, mais enfin bon…), au point que celui qui
dirigera le prochain gouvernement ayant autant de chance de s'en
sortir que celui qui courait nu dans un champs de mines espacées de
2 cm, il a presque fallu tirer à la courte paille pour décider de
qui aurait l'honneur de se faire empailler au 10 Downing street.

Oublions donc les Anglais (qu'on ne
peut même pas virer de la zone euro) et revenons à nos moutons
français. Peut-on parler, monsieur le premier ministre… allons, ne
craignons pas d'utiliser les mots tabous… peut-on parler de
rigueur, monsieur le premier ministre, concernant les
nouvelles dispositions que compte prendre le gouvernement français
pour réduire le déficit public?

Certainement pas!! s'étrangle le
premier ministre, ce n'est pas parce que nous parlons de réduire les
dépenses publiques notamment concernant les niches sociales, à
savoir toutes ces aides jugées superfétatoires, pour ne pas dire
indues, que nous persistons à ce qu'aucun rond de cuir sur deux
partant au club med du troisième âge ne soit remplacé, tout en
nous gardant bien par ailleurs d'augmenter les recettes de l'Etat
afin de ne pas taxer indument le contribuable, que l'on peut parler
de rigueur! La rigueur, c'est quand on ne dépense plus rien et qu'on
augmente les impôts! En bref, si vous voulez absolument un
mot en « eur », dites… eh bien « vigueur »
alors…

Soit, monsieur le premier ministre.
Vigueur des petits revenus dopés par la suppression de certaines
aides sociales, vigueur des fonctionnaires travaillant pour deux,
soit pour un demi, puisque c'est bien connu, ils peignent encore et
toujours la girafe dans les ministères, vigueur de ces hauts revenus
partant à pied de nuit par les monts et les vaux ouvrir des comptes
en Suisse pour y coucher leurs milliards pourtant si peu menacés,
vigueur des banquiers, et de leurs croupiers, les traders, continuant
à faire tourner la grande roue du casino d'une main eh bien
vigoureuse…

Si on est vraiment attaché au « eur »,
on pourra aussi utiliser le terme « gageure ». Gageure de
sortir un pays de la crise en réduisant encore un peu plus le
pouvoir d'achat de ses habitants les moins et moyennant fortunés,
soit les plus nombreux, gageure de préférer sauver l'euro plutôt
que l'emploi et donc la croissance, gageure de vouloir sauver le du
budget de l'Etat en diminuant les dépenses sans augmenter les
recettes, tout en s'accrochant comme Harpagon à sa cassette, au
bouclier fiscal et à ses niches, gageure encore de ne pas demander
aux croupiers de la finance, en grande partie responsables des
hoquets du marché, de ne pas mettre la main à la poche en
s'acquittant de quelques taxes, gageure…

Si on était vraiment acculé, démuni
de « eur », on pourra aussi user du terme « rumeur ».
Rumeur de déficit public, rumeur de dépenses exponentielles, rumeur
de faillite sociale, rumeur de débordement chez Pôle emploi, rumeur
de suicides sur certains lieux de travail, rumeur de violences sur
élèves ou professeurs dans les lycées, rumeur…

Eh oui, et si tout ceci, à commencer
par le déficit public, le trou de la Sécu et des retraites était
purement et simplement une rumeur?!

Anyway, rumeur ou pas, la Grèce menace
de faire banqueroute avec un déficit public abyssal, elle ne pourra
bientôt plus faire face à ses remboursements? Les bourses
s'effondrent, ou presque. On aide la Grèce, on promet de se serrer
la ceinture, tous, du nord au sud? Les bourses montent mais rechutent
bientôt car qu'en sera-t-il alors de la croissance hein? En bref,
les bourses ne sont jamais contentes ou bien alors en proie à une
angoisse proprement névrotique.

Mais peut-être au fond ont-elles le souci,
les bourses, du terme exact et que prononcer ainsi le mot
« rigueur », même très vite les yeux fermés, les
rassurerait enfin?

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