On la trouvait plutôt jolie Lily

On la trouvait plutôt jolie Lily
Elle arrivait des Somalies, Lily
Dans un bateau plein d’immigrés
Qui venait tous de leur plein gré
Vider les poubelles à Paris*

Lily, son problème c’est qu’elle était pas née du bon côté de la barrière (imagions que Pierre Péret est écrit cette chanson en 2006). Elle était née à une époque où on ne rigolait plus. Sur terre, enfin, plutôt dans l’hémisphère nord, c'était devenu quotas et barbelés, plutôt qu'esperanto on va tous se causer. C’était l’époque des tris sélectifs pratiqués par des trieurs que je me demande même s’ils savaient qui vidait leurs poubelles, qui nettoyait leurs bureaux, qui gardait leurs chiards et qui construisait leurs maisons.

Elle a déchargé des cageots, Lily
Elle s’est tapé les sal’s boulots, Lily
Elle crie pour vendre des choux-fleurs
Dans la rue, ses frè’s de couleur
L’accompagn’t au marteau piqueur

Tiens, qu’est-ce que je vous disais. Mais peut être que Nicolas, Dominique et les autres ne sortent-ils jamais dans la rue ? Qu’ils ne vont jamais à Rungis ou ailleurs, ou même tout simplement sur leur marché de quartier, leur panier sous le bras avec un passage par Aligre et Château-Rouge ? Que leurs regards, dans leurs voitures de fonction aux vitres fumées, ne descend jamais au niveau du trottoir où le marteau piqueur pique le macadam aux mains d’un gars du tiers monde rarement diplômé d’une high school, il faut bien le dire. Pour vous dire, moi, je vois même des vieux qui piquent le trottoir, à mort les vieux qui volent le marteau piqueur aux jeunes.

Et puis qu'ils se rassurent : comme me disait un jour  un élève malien en cours d'alphabétisation alors qu'on étudait le conditionnel, faites moi une belle phrase, si je pouvais travailler au Mali, je viendrais pas en France.

Et c’est pour conjurer sa peur, lily
Qu’ell’ lève un poing rageur, Lily
Au milieu de tous ces gugus
Qui foutent le feu aux autobus
Interdits aux gens de couleur.

Là, on est partis aux States, au temps de Martin Luther King et d’Angela Davis. Chez nous, c’est l’étape suivante, c’est les descendants de Lily qui mettront le feu aux autobus et aux voitures de Mohamed, Jean-Pierre ou Aglaé qui n’habite pas le quartier de l’Elysée juste parce qu’elle préfère vivre à la Courneuve ou à Stain, en suant du burnous à esssayer de gagner son smic chaque mois.

On dresse ensuite les malheureux contre les malheureux, et on dit à ceux qui ont envie d’autre chose comme société que, n’habitant à Val Fourré profond la galère, ils n’ont pas le droit de causer et qu’on aimerait bien les y voir à vivre ainsi parmi les émigrés hein ma bonne dame Bobo. Que c'est trop facile de jouer la corde du sentiment et de laisser les basses oeuvres du réalisme aux autres (touchez pas à mon compte secret).

Pas si facile que ça d’essayer de composer avec le monde qui monte et celui qui s’enfonce pour créer autre chose. Et question réalisme, par exemple, construisons des Hlm dans Paris et pas des bureaux et pas que dans le nord-est de la capitale, développons les jardins d’enfants nés il y a une quinzaine d’années d’un cerveau un peu moins con que les autres, qui s’est dit qu’il fallait éduquer les petits pas aidés et les mélanger à ceux plus aidés avec des éducateurs spécialisés et non des profs, au lieu que de les entasser à 30 par classe dans des écoles maternelles qui n’avaient de maternelle que le nom avec une maîtresse archi bonne en orthographe mais sans connaissance aucune de la petite enfance.

J’en ai d’autres, des idées, mais désolée je me les garde, dès fois qu’un Nicolas, un Dominique, une Ségolène ou un Laurent-François viendraient me les piquer pour réussir à remporter l'imunnité présidentielle.

Mais dans ton combat quotidien, lily
Tu connaîtras un type bien, Lily
Et l’enfant qui naîtra un jour
Aura la couleur de l’amour
Contre laquelle on ne peut rien

Tout ça pour conclure sur une note plus gaie. Et pour dire qu’il y a pas que le foot pour réussir dans la vie quand on est pas né Normand ou Tourangeau de (vieille) souche.

* Pierre Péret a écrit cette chanson il a y au moins 15 ans je pense. Il paraît que cette chanson est "tombée" au bac cette année, les élèves devaient écrire la lettre de Lily adressée à ses parents, un an après son arrivée en France, y dénonçant le racisme et l'hostilité. Personnellement, je ne trouve pas ça une bonne idée, les sujets "fermés", ce n'est jamais une bonne idée, surtout en temps de crise. Il n'empêche, la chanson reste simple et jolie, comme Lily.

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