Français ou voyou, il faut choisir!

Tel est le cri du coeur d'un des chiens
de garde de la majorité, Kiki Estrosi. Celui là même qui trouvait
déjà de bonne pédagogie et de légitime justice de sucrer les
allocs aux parents de mineurs délinquants, voire de les envoyer en
taule à leur place si leurs chères têtes blondes s'obstinaient à
ne pas respecter le deal passé avec le juge, ou bien à traîner
dehors à des heures indues.

Bon, à chaque fois, l'image de la mère
célibataire élevant seule ses enfants tout en vidant de 20 h 00 à
23 h 00 les poubelles de nos bureaux avant que de rempiler pour une
heure de 6 à 7 dans la croissanterie du coin, me vient à l'esprit.
Que n'a-t-elle pas songé, cette pauvre femme, avant que de se faire
engrosser ou larguée par le père de ses mioches, à demander le don
d'ubiquité pour être auprès de ses enfants tout en travaillant à
l'extérieur dans le même temps. Mère ou célibataire, il faut
choisir!


Quant à ce cri du coeur, Français ou
voyou il faut choisir! J'ai trouvé ça comment dire… un peu dur.
Pauvre Eric… ce n'est pas parce qu'il a vraisemblablement pistonné
sa femme pour donner un coup de main à Liliane et ses milliards, ni
qu'il est intervenu dans la succession de César pour en alléger le
coût fiscal qu'il faut non seulement le traiter de voyou mais, en
plus
, le menacer de déchéance de la nationalité française.

Et d'ailleurs, vers quelle nationalité
pourrait-il se tourner? La bas-rhinoise? Voilà un pays natal dans
lequel il n'a jamais mis les pieds! Né à Creil, il a passé toute
sa vie en Ile de France et on voudrait qu'il retourne chez lui, chez
les siens, ces bas-Rhinois dont il ne connait ni la langue ni les
coutumes? Quelle cruauté…

Liliane, quant à elle, serait juste
menacée d'asile, non pas politique mais sénile. On pourrait bien
évidemment la renvoyer en Normandie, son pays natal, aux Açores ou
à Madère, ses autres origines nationales, mais à son âge, on aura
pitié. On ne peut tout de même pas demander à une vieille dame de
88 ans de recommencer sa vie à zéro dans un pays inconnu, dont elle
ne pratique ni la langue ni les coutumes, et où il lui serait
extrêmement difficile de s'intégrer avant que la grande faucheuse
ne vienne la mander;

On peut exiger cela à la rigueur d'un
ministre quinquagénaire, mais d'une octogénaire qui a toutes ses
racines dans le seizième arrondissement, ce serait par trop
inhumain. D'ailleurs, la même légitime mansuétude avait prévalu
concernant Maurice Papon. Renvoyer cet octogénaire dans son
Bordelais d'extraction, après tant d'années passées à Paris,
c'eût été par trop inhumain. Tant il est vrai, qui plus est,
qu'être condamné pour crime contre l'humanité ne présente pas le
même degré de dangerosité et de gravité pour la société au
temps présent que le voleur de mobylette ou le vendeur de haschisch.

Quant à ces jeunes délinquants
justement, en col de sweat, tous ces jeunes dizainaires, vingtenaires
ou trentenaires dont les patronymes fleurent indiscutablement l'épice
méditerranéenne ou le millet africain, ils sont eux à un âge où
l'aventure est au coin de la rue. Retourner dans le pays de leurs
ancêtres peut être pour eux l'opportunité de démarrer une
existence loin de ces tours HLM où ils ont grandi et commis ces
délits qui, à force de répétition, ont lassé la Justice de ce
pays qui avait pourtant accueilli leurs parents à bras ouverts
(moyennant une force de travail que leurs enfants, hélas, n'ont pas
semblé jugé utile de reproduire), et qui n'a eu d'autre solution,
pour préserver sa cohésion sociale (et son électorat) que de les
renvoyer au pays de leurs ancêtres où là, peut-être, plongés
dans ce nouveau terreau, ils fleuriront enfin comme leurs
ex-cocitoyens du même âge.

On me dit que Lies Benhhadj serait
viscéralement attaché à sa racine nantaise… qu'il jouerait du
biniou, barrerait admirablement le catamaran de son beau-frère,
marin-pécheur barbichu, et qu'il serait par ailleurs l'as de la
crêpe sautée. Ceci justifiant absolument, selon ses défenseurs,
une non déchéance de sa nationalité française. Je vous en laisse
seuls juges, sachant qu'il pourrait aussi bien barrer son catamaran
aux larges des côtes d'Alger, en compagnie d'une de ses nombreuses
épouses, auprès de laquelle il apprendrait par ailleurs à
confectionner le couscous algérien tout en révisant ses premières
leçons de oud. Quand on arrive à réunir sur sa seule tête autant
de délits résolument non coutumiers de l'état de Français
(polygamie avec femmes en burka, viol aggravé, et je vous en passe),
il faut savoir en tirer les conclusions logiques qui s'imposent.
Nantais ou voyou, il fallait choisir!

Sinon, question subsidiaire, concernant
le voyou normand, breton ou parisien, dit de souche, pourrait-on
envisager une déchéance de quelque chose… puisque pour la
nationalité, c'est fichu, à moins de remonter il est vrai à ses
arrière-arrière-grands-parents. Une déchéance de son humanité,
serait-elle envisageable? Un bannissement pur et simple de son
appartenance à la communauté humaine qui se traduirait par, je ne
sais pas moi, l'obligation de se déplacer à quatre pattes, de
porter une muselière, d'arborer une laisse, ou bien l'interdiction
d'entrée dans les magasins, les bâtiments administratifs et les
transports en commun (à moins que d'être transporté dans un sac),
que sais-je encore, il y a tant de façon de déchoir de son humanité
un individu… demandez à Maurice!

Quant à moi, Marie Chotek, si par
inadvertance on me pinçait dans le 102 où je rechigne à mettre un
ticket pour deux stations quand je viens d'en mettre un dans le
métro, et qu'on songeait alors à m'infliger la triple peine, une
amende, une fessée et un renvoi dans mes pénates originelles, je me
retrouverais alors en Autriche, à moins que ce ne soit en Bosnie où
feue mon aïeule périt en longeant la Mijacka, avec le père de ses
enfants… quelles seraient alors mes perspectives de carrière au
delà de mon intégration problématique dans un pays dont je ne
pratique ni la langue ni les coutumes (à part la bourek et la
rakjia)?

Aussi, mue par la peur, vais-je
m'efforcer désormais de m'acquitter de mon ticket en bonne et due
forme, ne comptant pas en effet en plus d'élever un petit enfant,
d'en accueillir un second, tout en poursuivant mon oeuvre littéraire
et ma recherche d'emploi en Provence, me mettre à apprendre
l'allemand ou le bosniaque pour survivre dans une contrée où
j'accepterai à la rigueur de me rendre en touriste mais certainement
pas à m'y implanter durablement (à moins qu'on ne me promette un éditeur en bonne et due forme, lui aussi).

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