En voiture siouplait!

Le métro japonais est
drôlement pratique, tout le monde vous le dira. Et puis, si on s'y
perd, ça n'est pas très grave, il y a plein de gens en casquette
bleue pour vous aider (certes en japonais courant généralement) et
puis, comme c'est climatisé, autant errer dedans plutôt que dehors
où soit il fait très chaud et très soleil, soit, comme depuis
mardi, très chaud, très moite et très pluie (pluie que toute bonne
mère de famille européenne considère comme hautement radioactive,
équipant ainsi la marmaille de plastique de pied à la tête avec
une parano que Staline lui-même aurait admirée, pour ne pas dire
jalousée).

Concernant le métro
tokyoite, il suffit de comprendre quelques petites choses.

Il y a plusieurs
compagnies qui se disputent le marché du déplacement souterrain (et aérien). Donc qui dit
compagnie différente, dit ticket différent, donc nouveau paiement
ou bien transfert par le biais d'une machine avec indications en
kanjis (idéogrammes chinois)… et, ouf, en anglais. Ce qui, au total, fait bien sûr des trajets plus chers, ben
oui, c'est un peu comme les taxis qui prennent une charge de
départ… Quand on sort d'une ligne exploitée par une compagnie,
par exemple la JR ligne ou la Tokyo line, la machine vous calcule le
prix à payer pour compenser ou non le trajet effectué avec la
compagnie empruntée précédemment, afin de rétablir la réalité
du montant dû au total (hum hum, est-ce clair?)

On paie au nombre de
stations effectuées, ce qui est certes astreignant mais aussi
égalitariste, pas comme en France où vous pouvez avec un seul
ticket vous balader toute une journée et une nuit dans le métro du
nord au sud en passant par l'Est et la banlieue Ouest, alors que vous
payez strictement le même prix (un ticket) pour ne faire seulement que deux
stations.

Bon, concernant le dit
paiement, le hic c'est que parfois les noms des stations ne sont
indiquées qu'en kanjis et autant dire
que là, vous choisissez un montant au hasard dans les montants
proposés, en évaluant à peu près le prix au nombre de stations
effectuées… De toute façon, à la sortie, il n'y a pas de
barrière, juste une casquette bleue dans la guérite de sortie qui
pour le moment ne m'a pas alpaguée quand je suis sortie sans mettre
de ticket (sans compter qu'un Zébu en votre compagnie a tendance à
garder le ticket une fois mis dans la machine et donc à le perdre,
sans oublier sa bordélique de mère qui le fourre toujours on ne
sait où). Je compte naïvement sur la grande délicatesse et
diplomatie des autorités pour ne pas être verbalisée, sans oublier
non plus le respect dû aux gaijins (étrangers) qui viennent
de loin et sont si peu nombreux au Japon, etc etc, je vous tiendrai
au courant si par hasard je me retrouvais au poste de police.

Ensuite, pour naviguer,
il suffit d'avoir un bon plan, issu d'un guide en français de
préférence (en tout cas pas en idéogramme chinois!!) et de repérer
les couleurs ainsi que la lettre de la ligne que l'on doit emprunter.
Nous empruntons le plus souvent la ligne verte, Chiyoda, notre
station est yoyogi koen. Chaque station a par ailleurs un chiffre, ce
qui est très pratique pour s'apercevoir qu'on s'est gouré de sens
(tiens on en est à la 14 alors qu'on devrait en être à la 2…), et dans la
rame, elles sont souvent annoncées et indiquées en japonais, puis
en anglais, ce qui vous laisse une chance pour ne pas vous retrouver
à l'aéroport, par exemple.

Bref, même une relative
empotée comme moi arrive à se débrouiller facilement dans le métro
sauf au début où A m'a entraînée dans le RER local et là, l'horreur,
plus de couleur, ni de chiffres et de lettres, et en plus des histoires de
rapid, express et local où il faut descendre soudain à une station
pour en reprendre un autre, sur le quai d'en face, pour une seule
station parfois, à tel point qu'on a mis une éternité pour faire 4
stations en direction de l'Est où se trouvait ce supermarché méga
grand (bof) où un papi japonais, sans doute nostalgique de l'Axe,
nous a à moitié craché dessus.

A part ça, le métro
japonais est bien mieux équipé que le parisien concernant les
poussettes et les handicapés en fauteuil roulant. Il y a pas mal
d'ascenseurs, et d'escaliers roulants voire de monte ou descente
charge pour les fauteuils. En revanche, on peut crever avec sa
poussette dans les escaliers, le Japonais n'aide pas. Du moins les
hommes car les femmes, elles, peuvent vous donner un coup de main à
l'occasion si elles ne sont pas trop jeunes (non reproduites) ou trop
vieilles (trop décaties mais elles peuvent vous aider volontiers à
porter votre sac).

La femme japonaise d'un
collègue de A, Tamami, me l'a confirmé, les hommes japonais sont
les ennemis de la femme libérée (qui se déplace voire qui
travaille) et c'est pour ça qu'elle, Tamami, est bien contente
d'avoir épousé un gaijin (même s'il ne fait pas tant de choses que
ça à la maison). Par ailleurs, il semblerait que si le Japonais est
d'esprit très collectif voire empathique quand il est dans une relation personnalisée, même mineure, il tend à
se transformer en mufle dès lors que la dite relation est anonyme. A
moins de me ruer vers un salary man en lui clamant, hello, my name is
Marie Chotek, nice to meet you! afin d'introduire une relative
intimité, je n'ai plus qu'à faire une croix sur l'aide mâle
nippone dans le métro…

Sinon, à propos de
femme, dans le métro tokyoite, il y a une rame réservée aux
femmes, women only, à des horaires de pointe, genre 7h48 à 9h30,
7h21 à 9h30… au-delà, la feignasse qui a traîné au lit, est
bonne pour se pincer le derrière en allant gagner sa croute. De
même, la zélée qui s'est levée aux aurores pour être la première
à faire pointer n'aura qu'à bien serrer les fesses si elle veut les
protéger du mâle nippon… que je ne voyais pas du tout sous cet angle
là, je dois bien avouer. Même si je sais, on nous le repète
suffisamment, il y a des violeurs, peloteurs et pédophiles dans
toutes les cultures du monde, merci maman.

De toute façon, me
pincerait-on les fesses? Outre mon état de mère de famille, d'âge
honorable qui plus est, je suis une gaijin, comprenez que je
sue et que je sens mauvais, j'insiste sur ce point car il semblerait
que du blanc et de la blanche émane une odeur si désagréable aux
narines nippones qu'une amie d'amie qui a vécu 3 ans au Japon, s'est
plaint que souvent, les gens se levaient quand elle s'asseyait à
côté d'eux.

Pour le moment, personne
ne s'est brutalement mis debout quand je me suis assise à ses côtés,
en tout cas ça ne m'a pas frappée, je suis peut-être trop bien
disposée encore ou je ne pue pas tant que ça la blanche. La
Zouflette, pour sa part, suscite des regards enamourés des vieilles
comme des collégiennes, des salarymen comme des papies (nostalgiques de l'Axe excepté), un peu moins le Zébu qui, lui, peut susciter la
réprobation car il gigote, se met à genoux sur les sièges (pour
regarder dehors où c'est juste un tunnel mais bon) ou râle super
peu discrètement quand il n'y a pas de place de libre pour installer
son séant ou ses petites voitures. Peu d'enfants dans le métro en
semaine, et le Zébu fait du bruit pour au moins une classe de
mouflets japs en partance pour visiter le zoo…

A part ça, avant de monter dans la rame pour se faire éventuellement pincer les fesses, sur le quai, on entend
des cuicui d'oiseaux. J'ai cru au départ qu'il y avait un pigeon
tokyoite égaré dans le coin, puis que j'avais des hallucinations
auditives mais A et le Zébu m'ont confirmé qu'ils les entendaient
aussi. Il semblerait donc que de même qu'à l'nstar de chez Nature et
découverte
en France, on diffuse dans le métro des cuicuis
apaisants d'oiseaux, sans doute destinés à relaxer le salaryman
sur-stressé et la woman active de même (sans oublier la housewife
desesperate avec sa poussette et ses courses entassées dedans que personne n'a aidée à descendre la volée de marches jusqu'au quai).

Dans la rame, les gens
sont généralement penchés sur l'écran de leurs portables ou
écoutent de la musique, les yeux fermés. J'ai vu aussi un certain
nombre de cadres dormir profondément, et mêmes des femmes, l'une
d'entre elles avait sa tête prête de toucher mon épaule… Comme
j'ai observé cela en pleine journée je me suis demandé si c'était
des travailleurs de nuit finissant leurs nuits (japonaises) à 14h00,
voire des salariés de la veille ayant explosé le compteur et
rentrant ainsi le lendemain au lieu de la veille au soir chez eux, ou
au contraire, des employés en avance, dormant le jour pour
travailler cette nuit là après avoir travaillé le matin (euh vous
suivez?). Ou alors juste des gens très fatigués, sans même avoir
travaillé si ça se trouve… En tout cas, il y en a beaucoup qui ne
font pas que fermer les yeux et qui dorment profondément.

Que dire sinon? Peu de
bruit, ce qui permet au Zébulon d'être bien entendu dans la rame toute
entière, et la Zouflette aussi quand elle s'y met. Peu de gens qui
lisent des livres papiers ou des journaux, mais il y en a (des femmes
surtout, comme en France) telle cette jeune et longue Japonaise qui
lisait son roman debout à côté de moi en souriant doucement à la
Zouflette de temps à autre. Des lycéennes qui gloussent en se
montrant leurs écrans de portable, jupe écossaise toujours
mi-cuisse, chaussettes aux genoux, bagues aux dents, genoux plein de
bleus et d'égratignures, et visage boudeur de la teenage type pour
les deux d'hier qui, je l'ai bien vu, me jetaient des regards furtifs
en échangeant des commentaires sans doute négatifs sur ma personne
(ne soyons pas parano que pour les légumes radioactifs).

Pas un seul Sdf (il y en
a, à Tokyo, mais dans les parcs), pas un seul chanteur a capela,
gratteur de cordes ou tripoteur de touches d'accordéon. Pas un seul
qui vienne de sortir de prison et qui demande une petite pièce pour
ne pas y retourner tout de suite ou de femme seule avec une dent en or et dix enfants élevés dans une caravane en périphérie poussant la
chansonnette du Temps des gitans, tout en agitant son dernier né
crasseux sous votre nez, nada… Alors comment vivent-ils, les sdf? Car
être installés dans les parcs, pourquoi pas, mais il faut bien
casser la croûte aussi. Aucun quêteur non plus dans la rue,
alors…? Voilà un point à éclaircir mais qui dépasse ici le
thème du jour, à savoir le métro tokyoite.

Enfin, pour sortir, on
introduit donc son ticket dans la machine qui l'avale, et si vous
l'avez perdu, eh bien vous pouvez sortir quand même, pas de barrière
soudainement dressée devant vous, pas de tourniquet non plus comme en France qui
empêche une sortie aussi digne qu'autonome et discrète de la femme
à poussette, de la célibataire à grosse valise ou à fauteuil
roulant, ou bien de la vieille dame à cannes anglaises, toutes
unanimement obligées d'aller mendier auprès du tenancier de la RATP
qui fait son sodoku derrière la vitre pour qui leur ouvre la porte,
et qui, après avoir évité votre regard puis aboyé un "Mettez votre
ticket dans la machine!" condescendra, peut-être, dans sa grande
magnanimité à vous ouvrir cette porte réservée aux handicapés de
toute sorte (si toutefois il y en a une, et qui fonctionne).

Vive le métro japonais!

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