Ni mac gaulois ni pleureuse arabe

Cry 

Je sais pas si vous avez échappé à l'effet Indigènes, sachant que je parle non pas du film mais de l'effet produit par le film sur les langues médiatiques, entre autres langues. Déjà, la couverture du Point, Faut-il avoir honte d'être français ? donnait le ton, de fausset comme d'habitude. Alors que je suis sûre que plein de gens arrivent à regarder les pages noires de leur histoire nationale sans se tordre les mains en se disant mon dieu mon dieu, comment vais-je survivre à cette infamie ? dois-je m'exiler ? ni au contraire, minorer, voire nier complètement ce qui a été fait (bon je suis peut être un peu trop optimiste là), il faut aussitôt qu'on ne nous laisse d'autre choix que celui d'être coupable ou victime, mac gaulois ou pleureuse arabe.

Certes, en tendant l'oreille, on entend des choses un peu plus subtiles mais bon, il faut bien la tendre son oreille. D'un côté, il y a des gens comme Pascal Bruckner qui fatiguent de ce qu'ils appellent le sanglot perpétuel de l'homme blanc, le masochisme européen de la perpétuelle culpabilité relativement à la colonisation du siècle passé. Tout n'est pas faux dans ce qu'il dit, comme on ne peut pas à chaque « égarement » des régimes des pays anciennement colonisés, se sentir directement coupables au nom de la colonisation qu'on y a menée. En revanche, quand il dit, la colonisation, c'est terminée, j'ai des doutes, Elf, Total, l'Irak, les régimes africains maintenus en place ou déboutés par l'Occident, ne relèvent pas vraiment à mon sens de la plus parfaite indépendance. Quand il dit aussi qu'on peut chez nous se payer la tête du Jésus alors zut, pourquoi devoir toujours mettre Mahomet sous verre, j'y vois une mauvaise foi inquiétante, car il oublier de préciser que ce sont des chrétiens qui se payent la poire de leur jésus et non des musulmans, par ailleurs particulièrement mal traités (y compris par eux-mêmes) dans le contexte politique actuel.
 
Ses remarques se tiendraient si toute la Terre fonctionnait avec le même accès que nous à la sécurité même relative et au bien être même relatif, et si les sanglots étaient par ailleurs suivis d'effet : ce n'est pas parce que certains adorent se battre la coulpe et mourraient de devoir admettre le fait qu'un noir peut être raciste, qu'il faut considérer ceux qui disent qu'on a mal fait et rien réparé, comme de purs masochistes et démagogues. Il oublie par exemple que la mise en place d'une plaque commémorative sur le front de Seine, en souvenir des cadavres arabes qui y ont été jetés suite à l'intervention pas du tout coloniale de la police meuh non, a pris son temps (plus de 30 ans), et qu'elle n'a pas plu à tout le monde, mon brave monsieur. Des actes comme ceux-ci, à mon sens, ne s'assimilent pas à de masochistes sanglots, mais à une reconnaissance vraiment officielle, donc mâture, qui va peut être permettre d'avancer sur le chemin du ni perpétuellement coupable, ni éternellement victime.
 
Comme disait le groupe Zebda à qui un jour on reprochait de ne pas changer de thèmes au fil des ans (moi beur moi méprisé), nos thèmes ne changent pas, car la situation n'a pas changé, bien au contraire…
 

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